Post teach
Qui est William Lafleur ? Ce collégien bizarre qu’on moquait pour ses dents ? Cet auteur potache apparu masqué en 2016 à la télé devant un Guy Bedos médusé ? Ce blogueur sans filtre qui narrait ses râteaux pris sur AdopteUnMec ? Cet écrivain du faux-semblant et de la dissimulation ? Ce prof d’anglais qui bossait sans relâche pour faire mieux que ses prédécesseurs ? Cet enseignant essoré qui a jeté l’éponge après 10 ans de classe ? Cette figure de la lutte contre la réforme Blanquer ? Cet auteur à succès dont L’Ex plus beau métier du monde, chronique amère du système éducatif français, agace rue de Grenelle et lui vaut un procès en diffamation ? Ce Basque mal à Sète ? Cet ancien Quimpérois ? Ce Néo-Toulousain ? Un peu tout cela à la fois, comme on le découvrira à la lecture de cette conversation à son image : loquace, piquante, compliquée, à tiroirs, masquée, velue par endroits, déplumée à d’autres, souvent touchante et toujours inattendue. (Paru dans Boudu)
📸 Orane Benoit
Élève, on considère que les profs sont nuls et qu’on ferait mieux à leur place. Était-ce votre cas ?
Ce que je sais c’est que je m’ennuyais ferme. Au collège, au début du cours, je pro- grammais ma calculette sur 3600 et je m’amusais à décompter une seconde à la fois pour arriver pile à zéro à la fin de l’heure.
Vous repensiez à cela lorsque vous enseigniez ?
Bien sûr. J’espérais secrètement qu’aucun de mes élèves ne fasse de même.
Estimez-vous avoir fait mieux que vos profs ?
J’ai essayé. À mes débuts je ne pensais même qu’à cela : enseigner efficacement, intéresser les élèves, les amuser pour qu’ils apprennent mieux, m’approcher de leurs préoc- cupations et de leurs centres d’intérêt… C’était un défi permanent. Je me disais : « Ah ! Tu as voulu faire mieux que les profs que tu as eus ? Eh bien, vas-y maintenant ! »
Résultat ?
Ça n’a pas été aussi simple que prévu. Une fois de l’autre côté du bureau, on mesure l’ampleur de la tâche. On comprend pourquoi les profs punissent, pourquoi ils adoptent des méthodes qui nous semblaient aberrantes ou injustes. On comprend l’utilité des contrôles surprise, les vertus de la carotte et du bâton… Alors, peu à peu, on s’éloigne du professeur idéal qu’on rêvait d’être, et on prend conscience que pour le bien de ses élèves, on ne pourra pas devenir ce prof démago qui ne propose que des trucs cools…
Que voulez-vous dire ?
Chercher à être aimé de ses élèves, c’est le schéma classique des premières années de prof. On veut enseigner aussi, évidemment, mais enseigner, c’est difficile. Plus difficile que de se faire aimer.
Est-il à ce point aisé de gagner l’affection des élèves ?
Il suffit de leur manifester de l’intérêt, de s’intéresser à des trucs d’ados (ce qui n’est pas difficile quand on a 24 ans), et de faire du name dropping sur les jeux vidéo et les mangas. On s’aperçoit vite que ce n’est pas la bonne approche.
Comment cette prise de conscience s’est-elle manifestée pour vous ?
La première année, j’avais deux classes de troisième. L’une d’un excellent niveau, l’autre… La suite en septembre dans BOUDU